18- Objet ludique mal identifié

Porté un temps comme fer de lance du service Xbox Live Arcade, la petite soucoupe volante de Insanely Twisted Shadow Planet (ITSP) est passée sous les radars, en totale furtivité, au moment de sa sortie cet été. Il faut dire que l’objet volant a été mal identifié.

Considéré longtemps comme un shoot’em up arty, ITSP est avant tout une expérience visuelle et auditive, artistiquement très proche du dessin animé, composé essentiellement d’énigmes agrémentées de quelques phases de tirs. Dans la panoplie des fonctions que la petite soucoupe trouve au cours de l’aventure, peu sont offensives. D’ailleurs, la première obtenue – et c’est révélateur – est la pince, qui permet l’interaction avec un monde vivant, dans tous les sens du terme : tout bouge sans cesse, au premier comme en arrière plan, avec une sensation de consistance très forte. Tout y est organique. Le joueur ne circule pas seulement dans le monde, il interagit avec lui avec un feedback immédiat.

Il faut dire que son créateur, Michel Gagné, est lui aussi un extraterrestre de la planète jeu vidéo. Accédant à la notoriété avec la bande-dessinée Zed ou le dessin animé Prelude to the Eden, ayant travaillé à Pixar ou à la Warner (Ratatouille, Le Géant de fer, Osmosis Jones, Horton), auteur d’expériences synesthésiques abstraites comme Sensology (à voir absolument ici), cet artiste ne se bride pas au média pour exprimer sa vision, avouant n’avoir pas joué au jeu vidéo depuis le début des années 90. D’ailleurs, l’univers graphique du jeu vient de son « label » Insanely Twisted Shadow, apparu dans une mini-série de dessins animés, Insanely Twisted Shadow Puppets, créée à l’occasion d’Halloween pour Nickelodeon (avec l’apparition de la soucoupe dans un épisode !).

Modeste, Michel Gagné s’est entouré de ce qu’il appelle une équipe « d’experts », FuelCell Games, menée par Joe Olson, l’homme qui l’a incité à faire un détour par la galaxie jeu vidéo, exploitant sciemment la méconnaissance de Michel Gagné. C’est ce que résume probablement le mieux la proposition portée par ITSP : avoir su se mettre volontairement au service de la liberté artistique d’un homme sans aucune préconception sur le média, en lui apportant un savoir-faire comme un outil à sa disposition.