Notules - 5 : winter is gaming
En janvier, on déballe les cadeaux, on solde les soldes, on se glisse dans de vieux chaussons confortables. Bref les longues nuits d’hiver sont plus ludiques que jamais. Avec Diablo III Anniversary, Day of the Tentacle Special Edition, Stardew Valley, Roundabout, Cache mon jeu par maman et MGS V.
Du vieux avec du neuf
Diablo 3, patch anniversaire (Blizzard, 2017)
D’une façon ou d’une autre, il fallait marquer les vingt ans de Diablo 1. L’actuel Diablo 3 accueille donc une nouvelle zone temporaire censée faire revivre l’ancêtre. Elle se résume en un Diablo 3 à la caméra changée, pixelisé, aux animations limitées — bref, plus moche. Il est assez gênant, voire même effrayant, de constater que la jeune génération Blizzard ne considère Diablo 1 que par le prisme de ses limitations techniques. Comme si les développeurs actuels voulaient convaincre (eux-mêmes ? ou les joueurs ?) que la série ne fait qu’évoluer pour le mieux. Pourtant, on peut aimer les trois Diablo pour des raisons bien différentes ... n’aurait-il pas été possible par exemple de rétablir une difficulté fixe, les jeux de lumière si particuliers, et ralentir grandement le rythme ? — Laurent Braud
Day of the Tentacle : Special Edition (LucasArts / Double Fine, 1993 / 2016)
Au risque de froisser les puristes, affirmons-le : Day of the Tentacle n’est plus très jouable. Après quelques heures passées à résoudre des énigmes merveilleusement tordues, qui s’entrelacent entre trois époques, le joueur ne manque pas, lorsque son intuition lui fait défaut, de se heurter à un mur. Au début des années 90, il aurait certainement entrepris l’escalade à tâtons : utiliser le dentier avec la peinture rouge ? Non, avec le clown alors ? Peut-être combiner le hamster avec le sèche-linge, toujours pas... Mais aujourd’hui, l’obstacle s’avère presque infranchissable, même si DoTT est parmi les point & clicks les plus accessibles de l’époque : le jeu n’en vaut tout simplement plus la chandelle (utiliser avec le chewing-gum ?). Qu’à cela ne tienne, les solutions abondent sur le web, nous offrant un sauf-conduit, et nous permettant de constater que si le chef-d’œuvre de Lucas Arts a perdu de sa superbe ludique, il demeure un exceptionnel dessin-animé interactif, brillamment bizarre. Le travail de restauration effectué par Double Fine est presque parfait, notamment les animations, qui calquent fidèlement celles de l’original –- on passe de celui-ci à la version spéciale d’un seul clic –- tout en s’adaptant aux résolutions HD. Nos trois freaks favoris, Bernard, le nerd chaloupé, Hoagie, le roadie arrondi et Laverne, l’étudiante en médecine exophtalmique, n’ont jamais été aussi plein de vie et de mauvais esprit. — Martin Lefebvre
Stardew Valley (Eric Barone, 2016)
Stardew Valley est sans doute le meilleur jeu de 2016 auquel on n’a pas envie de jouer. Eric Barone a réussi un tour de force en recréant à lui tout seul la magie des Harvest Moon. Comme dans la série de Natsume, qui a fait les belles heures des consoles Nintendo, le protagoniste s’implante dans une ferme dont il vient d’hériter ; il y cultive à la fois ses plantations et ses relations sociales ; il y récoltera peut-être la prospérité et l’amour. Si le charme bucolique est indéniable, les travaux des champs demandent une rigueur et une obstination qui nous font malheureusement défaut. Stardew Valley mérite amplement son succès, mais faute d’avoir la main verte et le temps nécessaire, nous préférons laisser le terrain en jachère. — ML
Joyeux bazar
Roundabout (No Goblin, 2014)
"Alors la limousine, elle tourne sur elle-même, sans s’arrêter." C’est tout ? Ben oui. Alors certes, il faut mentionner les absurdes cinématiques dont le jeu d’acteur louche (volontairement) vers le nanar, y compris pour le personnage principal dont le mutisme n’arrange pas les choses. Et on voit bien que les concepteurs ont bien essayé de donner plus de souffle à leur postulat en invoquant capacités spéciales, tableaux de classements, bidules à collectionner. Mais rien à faire, l’enthousiasme retombe bien vite. On a le droit d’être un jeu idiot, encore faut-il en faire quelque chose, sous peine de ... tourner en rond. —LB
Cache mon jeu par maman (hap Inc, mobile, 2016)
Dans un appartement japonais aux couleurs pastel de notice d’utilisation, maman a caché la console portable de notre jeune héros. A trente reprises, celui-ci doit résoudre un casse-tête – qui se paye la nôtre — afin de dénicher son précieux jouet, sans se faire pincer par la rusée ménagère. Pour cela, il doit fouiller le frigo, regarder sous le canapé, mais aussi faire danser sa grande soeur, se méfier des grues embusquées derrière un paravent, de la police qui surgit soudain d’un coussin, ou encore ouvrir la gueule d’un alligator. Cache mon jeu par maman est un escape room joyeusement surréaliste, qui se joue de nous le sourire aux lèvres, proprement irrésistible. — ML
En territoire ennemi
Metal Gear Solid V : the Phantom Pain (Konami, 2015)
On déjà longuement parlé de MSGV par ici, mais les auteurs semblaient aguerris aux subtilités de l’univers Kojima. Et pour un néophyte, pécéiste endurci, ça donne quoi ? Une réelle surprise que cette guerre d’Afghanistan au rendu plutôt réaliste, régulièrement ponctuée de quelques lieux communs dont le Japon a l’exclusivité : méga-robots, enfant qui vole, filles en soutif, zombies-poupées-ninja, pour ne citer que les plus évidents. Le scénario forme ainsi une tambouille incompréhensible dont on ne peut que deviner les nombreuses références. Curieusement, cette infâme mixture ne gêne en rien le gameplay, qui se hisse sans peine au rang des meilleurs jeux d’infiltration, malgré — ou grâce à ? — un second degré omniprésent. On avait bien entendu parler de cette série dont la meilleure arme serait une boîte en carton, mais on n’y croyait pas vraiment. C’est corrigé. — LB
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