12. Poisson frais

Destiny

En boucle

Malgré ses multiples imperfections, Destiny nous rive à nos manettes, et il ne nous lâche plus depuis sa sortie. La faute à une boucle ludique proprement stupéfiante, qui nous happe comme ces chansons que l’on croit d’abord un peu niaises avant de se les repasser en continu.

On ne peut pas dire que je m’y attendais : Halo ne m’a jamais vraiment enthousiasmé, je suis plutôt maladroit quand il s’agit d’enchaîner les tirs à la tête, et la machine commerciale lancée à plein régime pour nous vendre Destiny ne m’est guère sympathique. Tout au plus étais-je attiré par la perspective de jouer à un MMO-light, mais les critiques ont pointé à juste titre les déficiences de l’aspect social du blockbuster de Bungie. Et pourtant, après quarante heures de jeu, exclusivement consacrées au PvE, j’ai du mal à le cacher : je suis désespérément accro à Destiny.

La critique s’est surtout attardée, y compris ici-même, sur les nombreux défauts du jeu. Peut-être parce que depuis l’annonce en grande fanfare, la communication avait largement survendu l’ambiance et l’aspect narratif d’un jeu qui s’intéresse au final plus à ses mécanismes qu’à son atmosphère. Mais pour que Destiny parvienne à retenir l’attention de plus de trois millions de joueurs quotidiens un mois après son lancement [1], il ne doit pas tout faire de travers.

Eloge du jeu troué

On a beaucoup reproché à Destiny les défaillances de sa narration, qui enchaîne les coq-à-l’âne et se réduit à un squelette informe nous traînant sans que l’on sache trop bien pourquoi d’une planète du système solaire à une autre. Le jeu que nous avons entre les mains ressemble fort à un patchwork recousu dans la précipitation, afin de sortir dans les temps. Il se pourrait bien que cet état d’inachèvement contribue paradoxalement à renforcer l’expérience. Les fans de Cortana et du Master Chief m’en voudront peut-être, mais je ne fais pas vraiment confiance aux scénaristes de Bungie. En l’état, Destiny est un jeu presque dépourvu d’histoire, et c’est tant mieux, car débarrassée des cinématiques — il y en a bien quelques unes, assez grotesques, qui ont survécu —, l’expérience n’en est que plus pure, la belle mécanique du jeu n’en est que plus visible.

Le Centre Pompidou, détail

En un sens, et un peu par hasard, Destiny invente le AAA façon Renzo Piano, le MMO à la Beaubourg : dépouillé d’emballage, les coulisses du game design et du système de récompense nous apparaissent dans leur nudité. La seule voix constante, le ghost, espèce de petit robot volant qui nous suit tout au long de la partie, se contente de commentaires à côté de la plaque, qui provoquent un comique involontaire, comme quand après le dixième essai contre un boss particulièrement rugueux il nous répète, machinal, « vous croyez que c’est une bonne idée ? » D’ailleurs la plupart du temps il se tait, et son rôle principal consiste à servir d’outil de lancement pour les événements des donjons. Le symbole est presque trop beau pour être totalement involontaire. Quiconque a suffisamment pratiqué les MMO n’ignore pas que l’enrobage narratif devient de toutes manières rapidement transparent, et que les conversations comme les pratiques des joueurs se tournent invariablement vers les fonctionnalités, les stratégies, les systèmes, qui sont au centre de leurs préoccupations.

Les mordus du lore devront se contenter des pages de grimoire uniquement disponibles sur le site du développeur, ce qui pour être étonnant permet pourtant au joueur qui ignore ce hors-jeu de ne pas être pollué par l’inflation d’explications qu’on retrouve dans beaucoup de jeux à gros budget, lesquels veulent à tout prix nous convaincre de la cohérence de leur univers. A ce titre, Destiny a quelque chose d’old-school, qui rappelle presque la simplicité un peu mystérieuse des jeux d’arcade. On ne reconnaît pas les adversaires à leur rôle dans la narration, mais par leurs déplacements, leur aspect, leurs capacités : les gros légionnaires de l’espace qui bondissent avec légèreté, les armées de gobelins dont on doit viser le thorax, les chevaliers qui nous foncent dessus comme des buffles appartiennent à un écosystème presque exclusivement ludique, leur histoire est celle de leurs affrontements avec le joueur. On les identifie au bruit, au décor ou à la musique qui portent leur marque, on les flaire de loin, on finit par connaître par cœur leur emplacement, comme on connaît par cœur le positionnement des ennemis dans un niveau de Super Mario Bros. ou de Streets of Rage. Paradoxalement, c’est de cette relation muette, de cette appropriation de l’espace ponctuée seulement de rafales et d’explosions, que le monde mis en place par Bungie tire sa profondeur énigmatique.

Le ghost, élément fonctionnel

Il ne faut pas négliger le pouvoir créatif de l’erreur, de l’inachèvement. Mon moment favori dans le fabuleux Final Fantasy XII est une béance narrative, quand le jeu nous lâche enfin les rênes et qu’il nous demande de franchir un continent, par nos propres moyens. Dans Destiny, on n’a même pas besoin de finir l’histoire pour passer aux activités haut niveau. Et c’est tant mieux.

Un monde de mécanismes

Privé de béquilles narratives, l’univers de Destiny repose donc presque sur la seule force de ses mécanismes ludiques. Certains sont assez contre-intuitifs, comme cette normalisation du loot qui laisse une chance de trouver les objets les plus puissants alors qu’on se fait écraser durant un match de PvP, ou qu’on se promène dans une zone de bas niveau que le jeu nous oblige à revisiter. Car passé le niveau 20, le farming est obligatoire, et devient assez rude une fois le niveau 25 atteint : c’est évidemment une manière pour le développeur de diluer le contenu et d’augmenter artificiellement la durée du jeu, qui aurait pu proposer quelques assauts — l’équivalent des donjons — supplémentaires. Mais comme le note le blogueur Tobold, grand connaisseur des MMO, ce système de loot a le mérite de permettre de pratiquer le jeu par petits bouts, et de progresser même lorsqu’on n’est pas à 100 % de concentration.

La fameuse loot cave, rapidement patchée

Destiny permet ainsi au joueur de choisir le rythme, l’intensité de sa séance de jeu, et ne le pénalise pas s’il souhaite enchaîner les kills faciles dans les ruines du Cosmodrome, premier niveau du jeu. Pour éreintant qu’il puisse être, le farm est parfois étrangement libérateur. L’esprit flottant, on se laisse porter par la musique, on absorbe un peu de l’atmosphère — elle n’est pas totalement absente, notamment grâce à la formidable bande-son —, et l’on se familiarise avec des décors qu’on finit par connaître comme sa poche : les compromis rendus nécessaires par les versions old-gen du jeu ont contraint le développeur à resserrer l’espace en une série d’arènes relativement restreintes et reliées entre elles par des couloirs. Si bien que les tranchées poussiéreuses de Mars, la cité en ruines de Vénus, les temples engloutis de la Lune deviennent notre jardin, qu’on parcoure sous le roulement continu ou presque de la mitraille, agité par les vibrations incessantes du pad. On croise des joueurs pressés, on fouille les recoins en quête d’un coffre contenant les précieux matériaux indispenables à l’amélioration de notre équipement, et parfois apparaît un événement hautement lucratif sur lequel on se rue. On se croirait presque dans l’un de ces grinders coréens, une gigantesque machine à lentement accumuler, un stoner game par excellence.

Le cosmodrome, farming dans les ruines soviétiques

Par contre, si l’envie nous prend de nous mettre en danger, de jouer à la limite, Destiny ne manque pas de défis. Sans parler du raid, qui faute de temps et de combattants risque de me rester inaccessible, le jeu propose de refaire en boucle les donjons et les missions dans une version survitaminée, qui montre toute la science des level designers de Bungie. Si les boss en eux-mêmes ne changent guère, et si leur barre de vie ne constitue en somme qu’un élément de rythme, les joueurs se retrouvent sous la pression constante de vagues d’ennemis, qui se succèdent comme dans un engrenage aussi cruel que bien huilé. C’est alors que chaque recoin de l’arène prend tout son sens, que chaque cachette devient vitale. En jouant avec le nombre et le niveau des ennemis, mais aussi avec les règles même du jeu par le biais de modificateurs spéciaux (qui augmentent les dégats causés par certains types d’attaque, empêchent d’étourdir les adversaires, limitent la récupération de munitions, etc.), les développeurs parviennent à modifier l’équilibre de combats que l’on croyait connaître par cœur, sans pour autant tomber dans l’arbitraire. Destiny manque peut-être de contenu, mais les principes mis en place par Bungie, qui a pu bénéficier des années d’expérience sur Halo, sont d’une incroyable solidité, au point que le joueur s’oublie dans le feu de l’action.

Héroïsme sur canapé

Je suis le premier à m’esclaffer lorsque Destiny nous parle d’héroïsme et de légende... Qu’il y a-t-il de légendaire dans un produit standardisé pratiqué par des millions de joueur ? Et pourtant, sur le rebord de mon canapé, les yeux comme dans le vague, pendant que je fais cliqueter frénétiquement la manette, j’ai moins envie de rire. Car en un sens, Bungie parvient à simuler dans mon salon, quelque chose de cette frénésie guerrière, de cet enthousiasme barbare que célèbre Ernst Jünger dans Orages d’acier.

Pour nous plonger dans la bataille, Bungie a recours à des contrôles simples et efficaces, avec lesquels le joueur fait rapidement corps. L’aide à la visée n’empêche pas la finesse, et c’est un vrai plaisir de multiplier les bonds lunaires pour s’extirper des situations les plus hasardeuses. Les combats ont un rythme, les coups de feu un poids, qui est devenu depuis Halo la marque de fabrique du développeur. Quelque chose comme une frénésie pondérée, bien loin de l’hyper-vitesse des FPS à la souris, mais pas moins intense. Le gardien possède trois pouvoirs spéciaux (une attaque de mêlée, une grenade et une attaque spéciale), ainsi que trois armes, entre lesquels il s’agit de jongler pour survivre. Tout est une question de timing : ai-je le temps de recharger mon fusil à lunettes et d’aligner le boss, faut-il économiser mes roquettes pour le boss, dois-je conserver ma grenade pour la prochaine vague, ou au contraire l’utiliser pour nettoyer le terrain ? Même si les affrontements sont réglés comme du papier à musique et si l’IA des adversaires est plutôt rudimentaire, il ne s’agit pas pour le joueur d’appliquer une stratégie toute faite comme dans la majorité des MMO, mais de s’adapter aux circonstances de la bataille. Faut-il relever immédiatement l’allié à terre ou commencer par dégager les environs ? Faut-il se cacher, prendre de la distance, ou au contraire rentrer dans le tas ? Il n’y a pas de recette toute faite, mais avec l’expérience, le joueur commence à sentir le flux du combat, et parvient à décider à l’instinct quand il faut rester collé à un partenaire en danger afin de concentrer le feu, et quand il s’agit de s’éloigner pour prendre les ennemis à revers.

La durée des affrontements finaux, qui nécessitent de rester concentré pendant près de dix minutes, contribue aussi largement à créer la tension. Un combat bien engagé peut très vite se transformer en déroute pour peu qu’un joueur devienne imprudent. A mesure que baisse la vie du boss et que se multiplient les ennemis, la pression enfle au rythme de la musique, lancinante, stressante, hachée de coups de feu. Soudain, alors que le combat était presque fini, je me retrouve le dernier joueur en vie. Des hordes de robots-minotaures se dirigent vers moi de toutes parts, et mes pouvoirs ne sont pas encore chargés. Je bondis au dessus des lasers, mon écran se constelle de sang et mes mains de sueur. Tandis que je mitraille un chemin droit devant moi, abattant comme un forcené les vagues d’ennemis moins résistants, que je crible de coups précis au thorax, je tombe nez à nez sur trois autres minotaures. J’en achève un d’un coup de coude, je saute en arrière et je lance ma grenade. Je me retourne, et sous le feu je soigne mon partenaire, qui se relève. Mon écran vire au rouge, d’un coup de super pouvoir je finis le ménage, et je cours, haletant, vers un endroit où me cacher et récupérer.

Qu’importe le résultat, je viens de survivre, radieux et tremblant, à l’une de ces dizaines de petites fictions héroïques que m’a offertes Destiny, petits colliers de gameplay accrocheurs et irrésistible.

Game over ?

Il va pourtant bien falloir que cela s’arrête : au niveau 25, ma progression s’est singulièrement ralentie. J’ai peur que bientôt le grind ne m’épuise et que la boucle des donjons finisse par tourner à vide, faute d’avoir le temps de me consacrer au raid ou le désir de me mettre au PvP. Pourtant, je n’ai pas vraiment envie d’arrêter le jeu, tant les sensations qu’il procure continuent à me ravir.

Cela tient parfois à pas grand-chose, la relation qu’on peut avoir avec un jeu. C’est souvent une question de circonstances, parfois de rencontres. Destiny ne favorise pas les rencontres, mais j’ai la chance d’avoir quelques compagnons d’infortune dans mon exploration du jeu. Et je me dis surtout que c’est justement de ce genre d’expérience, à la fois décérébrée et tactique, entêtante et facile d’accès dont j’avais besoin en ce moment. Un monde virtuel, lisse, un peu indifférent, où me perdre pour mieux me retrouver, quelque part entre le tueur de temps et la catharsis, un lieu où se déconnectent les problèmes réels, remplacés par la fiction d’un combat à mort.

L’attente jusqu’au premier DLC ajoutant du contenu, prévu pour décembre, risque d’être longue. D’autant que je me prends à rêver de nouveaux modes de jeu, par exemple un mélange de PvE et PvP... Si Bungie se donne les moyens de construire autour de son gameplay, l’affirmation selon laquelle la licence est là pour durer dix ans ne paraît pas si démesurée. Comme l’explique le camarade Touchais dans sa chronique du jeu, « Destiny a pris le risque considérable d’être un blockbuster innovant », et si elle n’a pas toujours été reconnue par une critique un peu prompte à pointer les manques, l’innovation pourrait bien s’avérer plutôt productive sur le long terme, tant la naissance d’un MMO-FPS grand public ouvre de perspectives ludiques.

Je risque de prendre des vacances entre temps, mais je serai sans aucun doute à la prochaine étape, brûlant d’impatience, prêt à retourner en boucle les nouveaux donjons, dans une quête absurde de maîtrise et de puissance. Ou alors je serai passé à autre chose, mais ce qui est sûr c’est que la fièvre aura été belle.

Notes

[1] Les chiffres délivrés par l’éditeur et rapportés par Eurogamer sont évidemment à prendre avec vigilance.

Il y a 5 Messages de forum pour "En boucle"
  • merluche Le 14 octobre 2014 à 09:57

    C’est le candy crush du FPS, creux et vain mais taillé pour captiver. On a troqué l’intelligence de Halo contre une DA artistique de haute volée, si ça suffit à la majorité pourquoi se priver. J’attendais le Halo 2.0 mais Destiny est au contraire l’anti halo :(

  • Harold Jouannet Le 14 octobre 2014 à 10:16

    J’aurai aimé que le jeu soit réellement dépouillé d’histoire, mais entre les cinématiques qu’on ne peut passer, et le jargon incessant de Ghost et les monologues imposés dans les chargements, j’ai eu du mal à en faire abstraction.
    Sinon, les questions qui parsèment le compte rendu de tes affrontements, c’est pas faux, et ça injecte réellement de la tension, mais ça me parait pas non plus le summum de la tactique de savoir quand recharger, utiliser sa grenade ou ranimer ses alliés :p
    Pour finir, je crois qu’Emmanuel qualifiait Destiny de "blockbuster innovant" pour son utilisation du skill (et des choix tactiques...), alors que tu références la naissance d’un MMO FPS grand public.
    Pour avoir à peine touché Defiance (bien moins impressionnant il faut l’avouer), il me parait plus ambitieux sur ce terrain shooter MMO grand public console, avec plus de joueurs et de coopération organique dans le monde, sans instance.
    Mais on se rejoint sur le feeling entêtant de Destiny.

  • Laurent Braud Le 14 octobre 2014 à 10:25

    Il va pourtant bien falloir que cela s’arrête : au niveau 25, ma progression s’est singulièrement ralentie. J’ai peur que bientôt le grind ne m’épuise et que la boucle des donjons finisse par tourner à vide, faute d’avoir le temps de me consacrer au raid ou le désir de me mettre au PvP.

    Les jeux à grind, on aimerait bien les passer en mode casual, une fois de temps en temps, pour en économiser la saveur. Mais ça ne marche pas comme ça ...

    Bon il faudrait vraiment que je le lise, cet Orages d’acier.

  • Martin Lefebvre Le 14 octobre 2014 à 10:31

    @Harold

    Pour ce qui est de la tactique, je préfère encore quelques décisions simples mais cruciales, surtout quand il faut les faire en temps réel, à un tas de choix plus circonstanciels... En pratique quand ça pète dans tous les coins, tu as tout de même beaucoup de décisions à prendre en peu de temps... où te placer, quel ennemi attaquer, avec quel outil, tout en pensant à ce qui t’attend par la suite...

    J’entends ce que tu dis sur le papier d’Emmanuel, mais pour moi en tant que joueur de PvE, justement le skill est nécessaire pour s’en sortir dans les donjons, qui sont au final l’aspect qui m’intéresse souvent le plus dans les MMO (parce que soyons honnête je n’ai guère le temps de m’inscrire dans le monde virtuel, sinon je jouerais plutôt à ArcheAge qu’à Destiny). J’ai l’impression que Destiny est le premier MMO-FPS grand public à proposer un PvE aussi développé, il me semble que Planetside par exemple est plutôt un jeu basé sur le PvP, non ?

    Tu veux pas nous écrire un papier sur Defiance ?

  • Harold Jouannet Le 14 octobre 2014 à 10:48

    Je ne remets pas en cause le bien fondé du point de vue d’Emmanuel sur le skill, hein ! Il en faut vraiment, je ne le discute pas. Je disais juste que vous ne parliez pas de la même chose en disant que c’était innovant.
    Pour la tactique, par contre, je trouve un Last of us multi bien plus riche. Ou quand tu te demandes si tu dois ranimer tes coéquipiers, c’est parce que l’ennemi (humain) peut t’avoir tendu un piège ! Et que tu dois composer à la volée ton arsenal. tu peux te cacher, courir, piéger le terrain, étourdir tes adversaires, les distraire, les contourner. C’est pas le même jeu du tout, mais ça me parait plus approprié d’y parler de "tactique" que dans Destiny ou, pour me répéter, on joue à cache cache entre les poteaux en attendant la fin des cooldowns ^^.

    Defiance, j’y ai joué qu’une poignée d’heures pour le moment.

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