Samedi 5 avril, à la médiathèque d’Argenteuil, j’ai participé, en compagnie d’Erwan Cario et de Mathieu Triclot, à une table ronde consacrée à l’écriture sur les jeux vidéo, devant un public restreint, mais de choix (merci à ceux qui ont fait le déplacement !). Je reproduis presque tel quel le texte que j’avais préparé, et que j’ai évidemment coupé pour ne pas endormir tout le monde.
« Mais non, je jouis »
Mathieu me pardonnera si je marche sur ses plates-bandes universitaires, mais je voudrais commencer par citer un critique littéraire, l’Allemand Hans Robert Jauss. Jauss est l’un des fondateurs de l’esthétique de la réception, dont le principe est de ne pas prendre en compte seulement le texte en lui-même, mais aussi ce que les lecteurs y trouvent. En 1972, il a prononcé à Constance une conférence intitulée « Petite apologie de l’expérience esthétique » [1], dans laquelle il commence par évoquer une réponse étonnante de Leo Spitzer, le très sérieux stylisticien...
« Un jour, comme un ami le trouvait assis à son bureau et le saluait de ces mots « tu travailles ? » à quoi Spitzer répond : « Moi, je travaille ? Mais non, je jouis. »
A partir de cette anecdote, Jauss remet en cause la distinction traditionnelle : « tirer de l’art une jouissance serait une chose, et mener une réflexion scientifique, historique ou théorique sur l’expérience artistique en serait une autre ». Il affirme au contraire que « L’attitude de jouissance dont l’art implique la possibilité et qu’il provoque est le fondement même de l’expérience esthétique ; il est impossible d’en faire abstraction, il faut au contraire la reprendre comme objet de réflexion théorique [...] ».
Contrairement à Jauss, je n’entends pas vous proposer de la grande théorie, mais j’aimerais réfléchir à cette question de l’expérience du joueur, et surtout à la manière dont elle peut être écrite par un journaliste, être le matériau d’une critique journalistique.
« Du bleu clair à l’obscurité la plus totale »
Il ne fait aucun doute que le récit d’une expérience a toujours été l’un des aspects du journalisme jeu vidéo... Par exemple, dans le numéro 3 de Tilt (début 1983), Jean-Michel Maman écrit un article intitulé « Passeport pour l’aventure ». Le papier décrit un genre, l’analyse, et se conclue même pas un tableau comparatif digne d’un magazine de consommation...
Mais le récit d’expérience n’est pas pour autant exclu. p. 53 à propos de The Quest (sur Atari 800), le rédacteur écrit :
Nous sommes situés après l’ultime conflit nucléaire et le héros marche vers l’ouest des Etats-Unis pour retrouver la dernière colonie humaine civilisée [le pitch de Fallout ou The Last of Us est presque déjà là]. Inutile de vous préciser que les monstres les plus répugnants et les plus hargneux jonchent sa route, sans compter les nuages de radiation et les insectes géants. Les effets audiovisuels sont remarquables : bruits du vent, des monstres qui marchent ou rampent, détonation des tirs ; la nuit tombe, et l’écran va du bleu clair à l’obscurité la plus totale, en passant par un superbe coucher de soleil.
Que les marques d’objectivation (la troisième personne, les termes « techniques » comme « écran », « effets audiovisuels », qui peuvent introduire une forme de mise à distance) ne nous trompent pas : Jean-Michel Maman nous raconte son expérience de joueur, ses perceptions, et touche presque au lyrisme dans sa dernière phrase. Expérience qui nous paraît a posteriori d’autant plus étonnante qu’on aura bien du mal à retrouver les mêmes impressions sur un jeu Atari 800... surtout qu’il m’a été impossible d’identifier le jeu en question.
On imagine bien l’importance qu’a pour les historiens du jeu vidéo ce type de témoignage, sans lequel il est impossible de comprendre comment se jouaient des jeux qui aujourd’hui nous paraissent obsolètes. Mais il me semble que ce genre de récit a aussi une grande importance pour ses lecteurs contemporains : jouer ce n’est pas seulement interagir avec un gameplay, un programme, c’est aussi vivre une expérience. Avant de lancer un jeu, j’ai envie de savoir quelle expérience m’attend, et pas seulement si le framerate est stable ou combien de fins différentes offre le jeu.
Le Nouveau journalisme
Cette prééminence de l’expérience est au centre de la réflexion du journaliste anglais Kieron Gillen, l’un des cofondateurs de Rock, Paper, Shotgun, qui a depuis quitté la profession pour devenir scénariste de Thor (à vrai dire c’est un peu inquiétant pour le journalisme vidéoludique qu’un de ses meilleurs représentants ait choisi de poursuivre sa carrière en écrivant pour Marvel, cela soit dit sans choquer les fans de comics). En 2004, il y a dix ans donc, Gillen a écrit un article qui a fait date, un manifeste du Nouveau Journalisme jeu vidéo.
Un peu de contexte d’abord, en 2004, les magazines sont en crise : leur fonction principale qui consistait à l’époque à produire des tests est concurrencée par le web. C’est une histoire connue, dans laquelle nous sommes encore, même si aujourd’hui il y a en France une renaissance du papier (pour combien de temps ?). En tout cas Gillen, qui travaillait à PC Gamer à l’époque, a lancé la conversation pendant une soirée arrosée au pub avec des collègues... Et il a transformé ses réflexions en manifeste, dans lequel il se demande comment justifier l’existence des magazines, qui sont forcément déconnectés de l’information en temps réel, de ce flux continu qui nous abasourdit sur le web.
Gillen propose de tout changer, d’abandonner les previews et les tests, et de s’inspirer du New Journalism de Tom Wolfe ou Hunter S. Thompson, les principaux reporters gonzo des années 70. « ce journalisme était intensément personnel, il balançait les règles du discours journalistique standard, comme la prétention à l’objectivité, et adoptait le « je » ».
L’idée centrale de Gillen, qui rejoint partiellement et de manière empirique l’esthétique de la réception est que « la valeur du jeu vidéo n’est pas dans le jeu, mais dans le joueur. » Il poursuit :
Ce qu’un joueur ressent et ce qu’il pense, tandis que cette étrange construction s’empare de ses sens est ce qui nous intéresse, pas les mécanismes qui sont derrière. Les jeux ont toujours fonctionné comme des hallucinogènes numériques – mais les journalistes se sont comportés comme des biochimistes dissertant sur les connexions neuronales. Le nouveau journalisme a pour but de raconter ce qu’on ressent quand la substance monte et que la réalité est remixée autour de vous.
Gillen se définit comme un « journaliste-voyageur vers des lieux imaginaires ». Même s’il reconnaît lui-même que son manifeste, par sa forme même, a quelque chose de « juvénile », l’idée ne manque pas d’attrait. D’autant que l’intérêt d’une telle démarche est qu’elle ne s’adresse pas qu’aux seuls joueurs, puisque selon Gillen « si le jeu vidéo est le sujet, en réalité cela parle de condition humaine. »
Egotisme
J’ai moi-même recours à cette méthode dans certains des papiers que je publie sur Merlanfrit : quand je raconte comment je joue à Proteus ou à Sly 4 avec mon fils, je parle évidemment du jeu, mais je m’adonne aussi à l’autobiographie, j’ai même parfois prétention à la poésie... C’est d’ailleurs assez flatteur pour un écrivain, parce que cela permet de parler de soi, parce que cela permet de sortir du cadre habituel très cadenassé de l’écriture vidéoludique... En décrivant les « soleils couchants » de The Quest ou de Minecraft, on peut presque se prendre pour Victor Hugo, ce qui fait toujours du bien à l’égo d’un littéraire comme moi. Il faut dire que certains jeux sont un magnifique support à l’imagination, et qu’après tout il n’y a rien de mal à s’émouvoir d’un paysage de pixels.
Le problème, évidemment, est l’égotisme galopant qui préside à une telle démarche, qui risque comme dit Stendhal d’étouffer le lecteur sous les « je mis avec des moi ». L’égotisme hugolien n’est pas une valeur en soi, et nous sommes bien loin de valoir l’auteur des Contemplations. Pour tout dire, l’évocation lyrique d’une expérience se prête mal à la répétition, et donc au rythme de publication imposé par la presse... pour un article génial issu du New Games Journalism, combien de ratés ? D’autant que face à la mode croissante des récits de partie, les Let’s Play, dont certains sont écrits en collaboration comme le fameux Boatmurdered qui a contribué à la popularité du jeu de gestion Dwarf Fortress, la légitimité d’un journaliste à être rémunéré pour ce genre de textes est discutable.
Ensuite, voyager dans des lieux imaginaires, bien sûr, mais est-ce vraiment voyager ? Pour l’écrivain voyageur Nicolas Bouvier, auteur du magnifique L’Usage du monde, « c’est le voyage qui vous fait ou vous défait ». Bouvier se dit incapable de voyager en chambre : en traversant l’Asie Centrale des années 50 en compagnie du peintre Thierry Vernet, Bouvier a réellement découvert un autre monde, d’autres cultures, des espaces inouïs... On en est loin quand un geek blanc de classe moyenne joue au jeu réalisé par d’autres geeks blancs de classe moyenne. Un des secrets de l’attrait du jeu vidéo est qu’il ne constitue pas tant une découverte de l’autre, qu’une affirmation confortable du même, de références et de valeurs communes, répétées ad nauseam (Tolkien et la SF grand public, la culture jeu vidéo classique, la réussite par l’accumulation, etc.). D’où l’intérêt que portent certains critiques aux jeux « outsiders », produits par des membres de minorités (raciales, sexuelles, etc.), où se confronter à un peu d’altérité. Ce n’est pas un hasard si le papier que Gillen prend pour référence, Bow Nigger, raconte un épisode raciste vécu lors d’une partie en ligne : l’incident nous permet (à Gillen ou à moi, qui ne sommes pas confrontés à ces problèmes) de nous mettre à la place d’une victime du racisme, de quitter notre confort habituel. C’est un papier magnifique, mais il ne me paraît pas pouvoir servir de matrice.
En somme il me semble qu’en tant que mouvement, le nouveau journalisme jeu vidéo a fait long feu, s’il a jamais existé. Mais j’aimerais terminer sur une note positive, en évoquant une méthode qui me paraît concilier journalisme et récit d’expérience. C’est celle qu’adopte un des journalistes les plus doués du moment, Simon Parkin, qui écrit pour Eurogamer, le Guardian et le New Yorker. En un sens Parkin est un disciple de Gillen, dans la mesure où il met en avant la dimension humaine du jeu. Il lui arrive, comme à tous les écrivains qui parlent de jeu, d’évoquer ses propres expériences. Mais ses papiers les plus intéressants sont consacrés à des joueurs, avec lesquels il s’entretient longuement, et dont il met en mot l’expérience.
A la recherche du Bigfoot
En écrivant pour le prestigieux New Yorker, Parkin s’adresse certes à un public de technophiles (il publie dans la partie consacrée aux sciences et technologies), mais pas forcément à des joueurs, ce qui lui permet de développer des sujets inattendus dans la presse spécialisée, et de prendre en compte l’aspect humain du jeu, sans doute plus apte à intéresser ses lecteurs que la résolution réelle de la version next-gen de Call of Duty. Il a ainsi consacré un article au parcours d’un des meilleurs joueurs de Battlefield 3, Yousif Mohammed, qui vit en Irak, dans la ville même où se situe un des niveaux du jeu. Mais il sait aussi trouver des sujets plus proches de nous, en s’intéressant à des joueurs aux démarches originales, mais qui n’en n’éclairent pas moins nos propres pratiques.
En août 2013, il a écrit un billet sur les chercheurs du Big Foot, que certains joueurs prétendent avoir aperçu dans GTA : San Andreas : légende urbaine ou clin d’oeil des développeurs ? Toujours est-il qu’une petite communauté d’acharnés continue de chercher. Vous excuserez la traduction un peu gourde.
La recherche du Bigfoot a donné aux chasseurs de mythe une raison de continuer à jouer à GTA longtemps après la fin de l’histoire principale. Krimmel visite San Andreas deux fois par semaine pour poursuivre sa traque, et il emporte un appareil photo in-game avec lui, dans l’espoir de faire un cliché de la créature. « J’ai fini le jeu deux fois, et mes statistiques sont au maximum, alors il ne me reste plus que ça à faire », dit-il. Pour Silver, l’attrait durable tient à la chance de trouver quelque chose de rare et de merveilleux. « Il n’y a peut-être qu’une chance sur cent de le trouver à mon sens, mais c’est cette possibilité qui fait que je reviens au jeu. »
En janvier, Parkin a publié un très bel article à Kurt J. Mac, un youtuber qui a décidé d’atteindre le bout du monde dans Minecraft : le monde généré aléatoirement par le jeu est théoriquement infini, mais un bug dans l’algorithme fait qu’à une certaine distance du point de départ, le jeu commence à planter. Markus Persson, le créateur du jeu nomme ce lieu les Terres lointaines (Far Lands) : depuis 3 ans, Kurt J. Mac marche vers ce but, il se filme et publie ses vidéos sur Youtube, où plus de 300.000 personnes le suivent.
En un sens, l’entreprise de Mac participe de l’esprit qui anime les explorateurs en quête d’inconnus lointains. Alors que nous vivons dans un monde méticuleusement cartographié par les satellites et les voitures de Google, il n’y a plus guère que les terres virtuelles qui puissent satisfaire notre soif d’ailleurs, et nous fournir des espaces où l’on puisse être, comme le dit Mac, « le premier ». « Mes spectateurs et moi nous sommes les seuls à jamais voir ces endroits » explique-t-il. « Une fois qu’on y est passé, plus personne ne les verra jamais ».
A travers ces portraits d’originaux, un peu « illuminés », Parkin parvient à évoquer ce qui nous attire dans les jeux open world comme GTA ou Minecraft : le mystère, l’aventure, la découverte de lieux inouïs. C’est tout de même plus intéressant qu’une dissection « objective » des mécanismes du gameplay.
Il n’y a pas qu’une façon d’écrire le jeu vidéo. Contrairement à ce qu’on a trop longtemps voulu nous faire croire, il me semble que les lecteurs ne sont pas avides que de tests et de previews. Il n’y a rien de mal à écrire des tests, un bon test demande d’ailleurs de réelles qualités rédactionnelles, et il y a des journalistes traditionnels qui dissèquent brillamment les mécanismes d’un jeu, comme Stuart Campbell. On peut aussi choisir de donner la parole aux créateurs, comme nous nous efforçons de le faire avec Games. Ce n’est pas toujours facile, surtout pour quelqu’un de bavard comme moi, je peux vous le garantir. On peut aussi aborder le jeu sous la forme de l’humour, de la parodie. Canard PC doit sans doute son succès autant à son ton qu’à son objectivité. Mais il me semble que l’essentiel est de prendre en compte cette dimension humaine qui donne vie tant aux jeux qu’à l’écriture qui leur est consacrée. Car pour jouir à l’instar de Leo Spitzer, et pour éclairer le lecteur sur ce à quoi il joue, on n’a pas encore trouvé d’équivalents à l’humain.
Notes
[1] Conférence disponible dans le recueil Pour une esthétique de la réception, Gallimard Tel
Vos commentaires
BlackLabel # Le 6 avril 2014 à 12:28
Martin Lefebvre :"Parkin parvient à évoquer ce qui nous attire dans les jeux open world comme GTA ou Minecraft : le mystère, l’aventure, la découverte de lieux inouïs. C’est tout de même plus intéressant qu’une dissection « objective » des mécanismes du gameplay."
C’est en disséquant ses mécaniques, sa partition visuelle et sonore qu’on parvient à comprendre, en partie, pourquoi un jeu fonctionne. Ou pourquoi il ne fonctionne pas. Facile de trouver un jeu formidable ou nul si on ne s’arrête sur aucun aspect tangible. C’est comme ça que les gros sites nous vendent des baudruches et créent des critères complètement absurdes.
Personnellement je me fiche royalement du ressenti de l’autre. Ce qui m’intéresse, c’est un texte qui ne se complait pas dans "Moi, ma vie, mon oeuvre", pour justement sortir de mon propre ressenti avec ses oeillères, élargir un horizon, m’intéressait à des jeux qui ne m’attirent pas de prime abord.
Je ne suis pas contre un avis plus personnel, parfois c’est une bonne approche, mais ça doit reposer sur du solide et du concret sinon c’est du blog.
Steph # Le 6 avril 2014 à 20:54
’Espérons que l’on trouve un jour la réponse à cette question.
Fand # Le 6 avril 2014 à 20:59
@BlackLabel : Je comprends votre point de vue, mais je ne suis pas d’accord avec tout.
Si on considère le jeu vidéo comme une oeuvre artistique, celui-ci ne peut pas se limiter à une simple analyse technique des mécanismes internes. Il serai aujourd’hui difficilement pensable de noter un film, un livre ou un album uniquement sur ses performances techniques, mais également sur le ressenti que le journaliste/blogueur entretient par rapport à cette oeuvre.
Une analyse technique est bien entendu importante puisqu’elle peut être fait avec un maximum d’objectivité, pour comprendre, comme vous dites, "pourquoi un jeu fonctionne". Mais je pense qu’une partie subjective est aussi intéressante à inclure pour disposer d’une analyse complète, car le jeux vidéo peut comporter une profondeur qu’il peut être impossible d’expliquer uniquement d’un point de vue des mécaniques.
Dans le fond, le plus important dans un article est le recul qu’à pris son rédacteur par rapport à son sujet, et cet article peut très bien inclure un aspect autobiographique afin d’expliquer l’évolution de son ressenti par rapport à sa progression dans le jeu tout en restant pertinent pour un grand nombre de lecteur.
Frédéric Oughdentz # Le 6 avril 2014 à 23:38
Voilà un article fort intéressant qui met le doit sur quelque chose qui me chiffonne depuis un bout de temps.
Tout d’abord, je ne vais pas me faire des amis en disant cela, mais je pense que la presse française actuelle (la presse spécialisée jeu vidéo, cela va sans dire), souffre encore de son héritage pataud du fanzinat des années 80, pour lequel tout le monde a de la nostalgie, c’est bien compréhensible, mais qui est en train, à mon avis, de desservir cette presse et le petit monde qui l’entoure, surtout à une époque où, on l’a déjà souligné, n’importe qui peut lancer son propre blog, sa chaîne de Let’s Play, et devenir gourou de sa petite communauté de joueurs, son avis valant bien celui d’un autre.
La principale difficulté que doit surmonter la presse, à mon avis, est qu’elle va devoir prendre une vraie décision éditoriale : se contenter d’être un guide d’achat, particulièrement prisé autour des fêtes de fin d’année, ou devenir un réel acteur de la critique, comme le cinéma en bénéficie depuis longtemps. Cette dernière option nécessitera forcément une grande connaissance technique que la presse française n’a pas encore à mon avis, car les termes techniques de framerate et de polygones sont l’arbre qui cache la forêt : on peut avoir vu un million de films et n’avoir toujours aucune idée de comment en réaliser un, même si on a appris au passage ce que signifiait travelling ou fish eye (il est également intéressant de voir que les joueurs actuels eux-mêmes sont bien plus connaisseurs de termes techniques que nous ne l’étions à leur âge).
Une critique suppose donc une réelle maîtrise du sujet, donc, pas simplement une culture liée à une consommation intensive du média. De ce point de vue, la presse ne me semble pas encore prête, même si le rapprochement avec les développeurs (notamment indépendants, forcément plus accessibles que les grands studios) tend à améliorer la situation progressivement. D’un autre côté, ceux qui veulent se donner de la crédibilité versent facilement dans la masturbation intellectuelle ou au contraire dans l’analyse médico-légale des mécaniques du jeu. Les deux peuvent avoir leur attrait pour le joueur esthète de l’un ou l’autre bord, mais je ne trouve pas encore qu’un juste équilibre soit atteint, et par juste équilibre je ne parle pas d’arriver à un point d’équilibre consensuel qui satisfasse tout le monde, mais plutôt d’un point critique où la presse spécialisée aura définitivement acquis une totale légitimité, notamment auprès des professionnels qui n’y verront plus qu’un vecteur de publicité ou au contraire un censeur, mais bien un allié dans leur recherche d’amélioration ; c’est à mon avis le rôle d’un critique.
Malgré le risque d’égotisme propre à une démarche centrée sur la réception (il ne faut pas oublier que "game play" ne désigne pas les mécaniques elles-mêmes, mais leur entre-jeu et donc leur interaction avec le joueur), il me semble qu’on pourrait trouver là un bon axe d’amélioration, sans pour autant tomber dans le Let’s Play divertissant mais rarement éclairé (ce n’est pas son rôle) de joueur qui ne se concentrent que sur leur propre expérience, faute de mieux.
Comme souvent, je pense que l’idéal consisterait en un mélange de plusieurs choses : un article critique, possédant sa part d’analyse froide, mais malgré tout agrémenté de ce qui a vécu ou trouvé l’auteur, et pourquoi pas une envolée lyrique sur ce que cela peut lui évoquer. Les journalistes qui commentent aujourd’hui encore 2001 : A Space Odyssey se limitent rarement, à juste titre, au film lui-même. Il est facile de digresser sur ses auteurs, Clarke et Kubrick, mais aussi sur les questions que le film soulève et qui n’ont peu de rapport avec lui, ou encore sur le choc esthétique qu’eux-mêmes on pu vivre lorsqu’ils ont "rencontré" le film.
BlackLabel # Le 7 avril 2014 à 16:53
Fand :
Oui évidemment. On est évidemment d’accord sur la question du recul, de voir un jeu dans son ensemble, et pas seulement les points qui nous intéressent.
Pour moi le souci c’est de baser une critique sur des mots flous comme "la poésie, un jeu d’une grande immersion", etc., les mots du ressenti, sans jamais se reposer sur des éléments solides provenant du jeu et donc communs à tous, puisque tous peuvent les voir dans le jeu, même si ça ne produit pas le même effet. Un jeu comme Red Dead Redemption est magnifique si on se fie à ses couchers de soleil. Penchons-nous sur des questions de scénario et de game-design, et là c’est la catastrophe.
C’est bien là d’ailleurs un grand défaut du jeu vidéo, il n’y a souvent aucune rigueur intellectuelle ou artistique derrière sa création, ni derrière sa critique, pas un début de logique ou de bon sens. Il me semble difficile de faire la part belle à l’expérience du joueur quand la plupart des jeux vidéo ne sont pas au point à d’innombrables niveaux. Ça ne fera que conforter les développeurs dans leur crétinerie. Sur merlanfrit, si je ne me trompe, j’avais lu un papier assez sévère sur Bioshock Infinite, là où les autres sites se laissaient duper par les prétentions artistiques de décors en carton-pâte et de discours réchauffés.
Le ressenti d’un gars qui ne voit aucun défaut dans un jeu qui suinte l’idiotie et l’incompétence, on en lit déjà trop.
Martin Lefebvre # Le 7 avril 2014 à 18:24
Le papier a été écrit pour un contexte précis, pour aborder une question précise... Il n’est pas forcément complet, puisque le but était de donner lieu à une discussion (et on a parlé d’autres choses avec les interventions d’Erwan et de Mathieu, puis les questions du public).
Erwan a eu une belle formule pour parler de sa façon d’écrire ; il fait un reportage, c’est à dire qu’il explique au lecteur ce qui s’est passé "sur les lieux du crime", il donne le contexte, il décrit le cas échéant. C’est un boulot de journaliste comme un autre, sauf que le sujet de l’enquête est un jeu.
Je suis un peu différent puisque j’écris plus sur des choses qui me font plaisir, étant donné que je ne suis pas vraiment pro (ie : je peux refuser des sujets pour Games, même c’est l’actu, puisque je n’en vis — heureusement — pas).
J’ai tendance à être pragmatique dans ma façon d’écrire, et d’éviter les recettes. Quand je joue, je réfléchis à ce qu’il y a à dire sur le jeu, et j’utilise la forme qui selon moi convient le mieux à ce que j’ai à dire... parfois ce sera subjectif, parfois plus une analyse des structures ludiques ou du discours que porte le jeu... Il m’arrive même de faire des "tests", ou disons des descriptions d’objet, quand je veux présenter un jeu un peu étrange assez rapidement, pour expliquer pourquoi il faut d’y pencher.
Enfin bref ce n’est pas un manifeste, même si j’aime beaucoup ce que fait Simon Parkin. :)
Laurent Braud # Le 7 avril 2014 à 21:28
Certains commentaires ont l’air de dire qu’il y aurait "la bonne façon" de parler du jeu vidéo, "l’idéal", mais que ce graal n’existe pas encore. C’est toujours agréable de se plaindre ; mais ce n’est pas ce que dit l’article. Au contraire, "il n’y a pas qu’une façon d’écrire le jeu vidéo.".
Personnellement, je trouve que l’éventail d’écrits disponibles est suffisamment large pour qu’on y trouve régulièrement ce que l’on veut, du récit très subjectif à la branlette intellectuelle, effectivement. Le problème, c’est simplement de s’y retrouver. C’est très clair sous la forme vidéo : youtube pullule de let’s play et de critiques en tous genre. Certaines sont excellentes, mais lesquelles ?
Fand # Le 8 avril 2014 à 02:31
@BlackLabel :
Il est vrai qu’un article basé sur le ressenti du journaliste/blogueur peut ne pas être pertinent, car nous ne sommes tous différents et avons eu nos expériences qui forgent nos façons de voir le monde, et un papier qui n’aborde pas l’aspect purement technique du titre peut-être incomplet.
Le lecteur peut également avoir envie de lire d’un aperçu différent d’un jeu. Si je veux un test bateau, je vais le lire sur jv.com, gamekult ou canardpc, en revanche si je souhaite une analyse plus approfondie sur la progression du scénario ou la narration par le level design, je vais chercher ça sur Merlantfrit ou les forges. Pour paraphraser Laurent Braud, le net regorge d’écrits différents et il y en a pour tout les goûts, du bon au très mauvais.
On peut regretter l’absence de tests basé sur des éléments concrets, mais il faut savoir que les testeurs sont généralement des joueurs et non pas des techniciens (je conseille d’ailleurs de lire Ernest Adams, game designer qui publie régulièrement des papiers sur Gamasutra).
Je me permets de poster ici une partie de l’à-propos que j’ai publié sur mon propre blog qui répondait à l’absence de note dans nos propres tests (je comprendrais tout à fait que la rédaction décide de tronquer cette partie de mon commentaire) :
“Nous nous sommes très vite accordés sur un point : nous ne mettrons pas de notes à nos tests. Nous nous sommes même un instant demandé si nous devions utiliser le terme « test » lorsqu’il s’agit de parler d’un jeu. En effet, qui aurait aujourd’hui l’idée d’attribuer une note à un film ou à un livre ? Le concept de noter un jeu vidéo ne pourrait valoir que si l’on testait la technique du jeu, par exemple l’efficacité du gameplay ou la stabilité du support. Seulement, cette partie n’est que la moitié de la richesse que compose un jeu vidéo. Cependant, il est impossible de tenir un avis objectif quand à richesse émotionnelle que peut nous apporter celui-ci. En conséquence, attribuer une note à un jeu vidéo ne peut être que réducteur. De plus, un joueur qui souhaite avoir un aperçu rapide d’un jeu se tournera vers les nombreux sites spécialisés, qui eux suivront toujours l’actualité.”
Je reste cependant persuadé qu’un papier écrit de manière tout à fait subjective (en le précisant bien en début d’article évidemment) expliquant les raisons qui fait qu’un jeu nous a touché peut être intéressant, ne serait-ce que pour avoir un point de vue différent du nôtre, même s’il existe bien entendu un tas de masturbations intellectuelles qui peuvent avoir peu de valeur.
Fand # Le 8 avril 2014 à 02:37
“C’est bien là d’ailleurs un grand défaut du jeu vidéo, il n’y a souvent aucune rigueur intellectuelle ou artistique derrière sa création, ni derrière sa critique, pas un début de logique ou de bon sens. Il me semble difficile de faire la part belle à l’expérience du joueur quand la plupart des jeux vidéo ne sont pas au point à d’innombrables niveaux. Ça ne fera que conforter les développeurs dans leur crétinerie. Sur merlanfrit, si je ne me trompe, j’avais lu un papier assez sévère sur Bioshock Infinite, là où les autres sites se laissaient duper par les prétentions artistiques de décors en carton-pâte et de discours réchauffés.”
Excusez-moi du double post mais j’ai oublié de répondre à cette partie :
Il ne faut pas oublier que le jeu vidéo grand public n’a aujourd’hui qu’une vingtaine d’année, trente tout au plus. Combien de film jusque dans les années trente cumulaient des erreurs que l’on trouverait aujourd’hui aberrante ? Bien sûr, ce n’est pas une raison pour se complaire dans la médiocrité, ni pour réfuter d’évidentes lacunes que peut avoir tel ou tel jeu.
Poppy # Le 9 avril 2014 à 10:11
Très bon article, bravo !
Je refuse catégoriquement de lire des articles relatant une expérience de jeu avant d’avoir jouer au jeu en question. Je pense que c’est pour la même raison que je n’ai aucune curiosité pour les vidéos de gens qui jouent. L’expérience, ou plutôt une expérience, c’est à moi de la découvrir et de la vivre, je n’ai pas besoin qu’on m’éclaire. Si je n’ai pas beaucoup d’autres choix que de trouver dans un jeu ce que ses créateurs ont voulu que j’y trouve, je ne vais surtout pas me mettre en situation de chercher ce qu’un autre joueur y a trouvé. Non mais quelle horreur sinon ! Je lis souvent des articles avant de jouer mais c’est pour y trouver des éléments objectifs et techniques qui vont me permettre d’identifier grossièrement les jeux susceptibles de m’intéresser. Du test conso en fait. Après c’est à moi de faire le boulot et j’y tiens. Mon plaisir à jouer se trouve beaucoup là. On m’a honteusement moqué sur le forum de Merlan pour m’être lancé dans TxK après avoir découvert que Martin avait écrit un article dessus mais sans l’avoir lu (c’est toujours le cas). OK mais au final c’est bien moi qui ai découvert le jeu, vierge de ce qu’un autre a pu y trouver. Ici Martin m’a juste signifié qu’il y avait quelque chose à trouver et ça m’a suffit. Pour l’expérience humaine, je la trouve ensuite sur les forums où l’expérience de jeu est souvent évoquée, et de manière adaptée pour moi, c’est à dire à travers de courts échanges.
# Le 9 avril 2014 à 11:34
La question posée par l’article est, comme on dit, une question purement rhétorique au moins parce que : 1) elle n’est jamais travaillée sérieusement : elle est un pur prétexte 2) les doutes qu’elle est censée soulever sont feints, car dans les faits il s’avère qu’on finit toujours par trancher la question, c’est-à-dire : on finit toujours par dire ce qu’il nous plait de dire de la façon dont il nous plait de le faire : anything goes. Autrement dit, si doute il y a avait vraiment, alors il devrait s’en suivre une suspension du jugement et la seule action qui pourrait alors convenir devrait être celle de se taire.
Pedrof # Le 9 avril 2014 à 16:52
BlackLabel
"Pour moi le souci c’est de baser une critique sur des mots flous comme "la poésie, un jeu d’une grande immersion", etc., les mots du ressenti, sans jamais se reposer sur des éléments solides provenant du jeu et donc communs à tous, puisque tous peuvent les voir dans le jeu, même si ça ne produit pas le même effet."
Je suis d’accord avec ça. Ça ne parle pas, ça ne dit rien "c’est immersif", "c’est poétique", ou même "le jeu est très fun". "Une fin magnifique" ça ne veut rien dire non plus.
David Barbosa # Le 9 avril 2014 à 17:23
Le point de vue posé par l’anonyme ci-dessus est, comme on ne devrait jamais le dire dans un monde parfait, un commentaire parasité par la mauvaise foi parce que : 1) il se contente de 511 caractères pour supposer qu’une question n’a guère été travaillée sérieusement alors que l’article compte plus de 12000 caractères et ne se conclue nullement par une interrogation, en appelant au contraire avec la plus ferme des convictions à la prise en compte de la dimension humaine dans l’écriture sur le jeu vidéo, afin de faire contrepoids au chantre de l’impersonnalité qu’est le test dit "conso" - c’est la défense aveugle envers et contre tout de ce dernier qui ne serait que pur prétexte sans relief car proclamant par on ne sait quel argumentaire creux et vain le maintien du status quo, donc du positionnement éditorial, stylistique et rédactionnel majoritaire depuis plus d’un quart de siècle 2) l’article appelant sans détour à injecter de l’humain, les doutes soi-disant soulevés sont inexistants. En outre, dans les faits, suivant les circonstances, le lieu, le moment, l’inspiration, les dispositions plus ou moins bonnes, le recul et/ou le jeu concerné, on ne tranche pas toujours la question. Plus exactement, on croit toujours la trancher mais on peut parfois être pris au piège par un conditionnement inconscient ; on ne finit pas par dire à sa manière ce qu’il nous plait de dire lorsque l’on copie sans se poser la moindre question des préceptes d’écriture établis depuis des lustres, a fortiori si le mérite de ces règles implicites n’a eu de cesse de s’étioler au fil des années. Donc, face au anything goes, posons le anything else. Ainsi, le doute est dissipé, et la parole non seulement permise, mais aussi pleinement nécessaire.
Alexis Bross # Le 9 avril 2014 à 17:41
D’accord avec Laurent Braud. Il existe dans le journalisme plusieurs types d’article : enquête, reportage, compte-rendu, critique, édito, interview, chronique etc. Tous ces registres participent à aborder la réalité selon un angle donné. On peut évidemment faire de même dans le jeu vidéo. L’enjeu est peut-être d’essayer de sortir des habitudes, de trouver quel type d’article doit s’imposer sur ce que l’on doit traiter. Et oui, pourquoi pas, placer l’humain au centre, non en parlant de soi mais des autres (toute la partie À la recherche du Bigfoot cite finalement des exemples de reportages classiques. L’effet nouveauté est que la presse JV en fait peu).
Pour avoir écrit des expériences de joueur par la passé, j’ai remarqué que celles dont j’étais satisfait n’étaient pas celles où le joueur était la finalité du récit, mais quand celui-ci était un moyen de mettre en évidence quelque chose dans les sensations procurées par le jeu, sensations qui ne peuvent s’exprimer que par un récit personnel, comme prisme. En clair, tenir un discours sur le jeu ou la société. Par exemple, quand j’avais écrit un texte sur Minecraft, je parle moins d’une somme de parties intégrées dans un récit de fiction que de la vanité humaine s’exprimant par un terrible game over.
Martin Lefebvre # Le 9 avril 2014 à 18:53
Oui en gros il me semble que Parkin fait des reportages au sens classique du terme, dont le sujet est la pratique du joueur. J’aurais peut-être dû l’exprimer comme ça. :)
Alexis Bross # Le 9 avril 2014 à 20:47
Oui voilà, c’est l’idée :)
Cela étant dit, je ne minimise pas la démarche de Parkin. J’ai consulté les liens donnés dans l’article et j’ai trouvé les sujets passionnants. Du coup, ça donne envie de faire des articles du même genre, dénicher un "illuminé", un performer, un ascète, un poète, un philosophe-joueur adepte de Kant, que sais-je.
miniblob # Le 9 avril 2014 à 22:29
Tout d’abord je tenais à te remercier pour cet article qui vient gentiment bousculer nos petites habitudes de travail ! C’est en se remettant régulièrement en cause qu’on peut avoir l’espoir d’évoluer, mais l’exercice n’est pas forcément évident à mener en solitaire. Il est vraiment salutaire de confronter différents points de vue sur la question pour permettre à la critique vidéoludique dans son ensemble d’évoluer.
Je dois t’avouer que ton article a réveillé une petite blessure chez moi : je viens de me replonger dans mon test de Fez histoire de le retoucher à l’occasion de la sortie du jeu sur le PSN (je précise que je travaille pour jeuxvideo.com), et le moins que l’on puisse dire c’est que je ne suis vraiment pas satisfait du traitement que je lui avais réservé. Je m’explique, il s’agit selon moi d’un jeu exceptionnel proposant différents degrés de lecture et de mon côté je n’avais à ma disposition qu’un test bien formaté pour essayer de retranscrire la magie de ce titre. Le terme même de "test" contient déjà en lui-même toutes les limites de l’exercice...
Bref, je dois reconnaître que l’article en question tient à mon avis assez peu de la critique au sens noble du terme. Je suis bien conscient de ce problème et j’ai même expérimenté à ma petite échelle quelques formules légèrement différentes. C’était le cas par exemple du test de Left Behind, le DLC de Last of Us que j’ai traité en évacuant tous les détails factuels et en me focalisant sur l’impression qu’il laissait au joueur.
On en revient finalement à ta réflexion de base : la difficulté de porter une critique sur un média qui ne se contente pas de faire de nous des spectateurs et qui nous donne le statut d’acteur. C’est bien l’expérience de jeu qu’on doit réussir à retranscrire, et pas forcément se cantonner à une description clinique du contenu du soft.
Le problème c’est qu’on touche là à une autre limite propre à la critique de jeu vidéo : le manque d’argumentaires solides, de références et peut-être de style littéraire de notre profession. Attention, je m’inclus bien entendu dans le lot, mais je trouve qu’on manque collectivement de talent. Quand j’entends des critiques d’art contemporain se crêper le chignon à propos des politiques muséographiques sur France Culture, je ne comprends rien à ce qu’ils disent mais au moins j’ai l’impression qu’ils ont des arguments, qu’ils ont des références ; ils donnent l’impression de savoir de quoi ils parlent et que leurs avis ultra subjectifs s’appuient sur des montagnes de savoir. J’ai malheureusement rarement cette impression lorsqu’il s’agit de jeux vidéo, tout du moins dans les colonnes des sites et des magazines généralistes.
Je noirci volontairement le tableau, il existe déjà de beaux exemples d’articles et de critiques qui abordent le jeu vidéo de manière drôle, surprenante ou intelligente. Les tests de Heavy Rain chez Factornews (http://www.factornews.com/test/heav...) ou de DmC au Journal du Gamer (http://www.journaldugamer.com/2013/...) me viennent par exemple en tête en matière d’originalité, mais j’ai peur qu’ils fassent figure d’exception venant confirmer la règle...
J’ai l’impression que je me suis un peu lâché et que mon poste a des allures de complainte autoflagellatrice (c’est certainement le manque de sommeil...) alors que mon but était tout simplement de te remercier de poser le débat :) C’est bête à dire mais je te remercie de tous nous pousser aux fesses pour réfléchir collectivement à la forme que devrait prendre notre travail.
Pedrof # Le 10 avril 2014 à 12:34
"C’était le cas par exemple du test de Left Behind, le DLC de Last of Us que j’ai traité en évacuant tous les détails factuels et en me focalisant sur l’impression qu’il laissait au joueur."
Au joueur ou à toi ? C’est pas la même chose, dans le premier cas tu n’assumes pas la subjectivité.
François # Le 10 avril 2014 à 18:08
De l’anonyme @ David Barbosa :
1) "Le point de vue posé par l’anonyme ci-dessus est, comme on ne devrait jamais le dire dans un monde parfait, un commentaire parasité par la mauvaise foi parce que : 1) il se contente de 511 caractères pour supposer qu’une question n’a guère été travaillée sérieusement alors que l’article compte plus de 12000 caractères et ne se conclue nullement par une interrogation, en appelant au contraire avec la plus ferme des convictions à la prise en compte de la dimension humaine dans l’écriture sur le jeu vidéo, afin de faire contrepoids au chantre de l’impersonnalité qu’est le test dit "conso" - c’est la défense aveugle envers et contre tout de ce dernier qui ne serait que pur prétexte sans relief car proclamant par on ne sait quel argumentaire creux et vain le maintien du status quo, donc du positionnement éditorial, stylistique et rédactionnel majoritaire depuis plus d’un quart de siècle".
— > il est vrai que la mauvaise foi est toujours du côté de la critique un tant soit peu moqueuse mais jamais du côté de la flatterie ; autrement dit, la critique n’est jamais assez informée, mais la flatterie est toujours déjà évidente et pertinente : elle se passe de justification. En outre, j’ignorais qu’il fallait un certain nombre minimal de signes pour être pris au sérieux : malheureusement ce que vous dites est tout simplement faux : il n’y a aucun rapport logique entre quantité et pertinence. Bref, il est bizarre que ne soyez pas aussi exigeant avec les "Très bon article" qui émaillent les commentaires, un genre de remarque qui ne semble pourtant pas satisfaire vos critères, à savoir : posséder le nombre minimal de caractères requis ( 3 < 12000), ni aucune autre justification que : "je suis d’accord, mon expérience le confirme" (en somme, on répond au moyen de ce qui devrait être interrogé (l’expérience personnel)). L’aspect péremptoire de mon 1er commentaire tendait ironiquement à souligner cette dissymétrie.
Par ailleurs, je ne vois pas en quoi « la ferme conviction » exprimée par tel auteur dans tel article devrait en elle-même faire taire les doutes : une conviction, aussi ferme soit-elle, peut être une croyance fausse, et les doutes persister légitimement.
2) "l’article appelant sans détour à injecter de l’humain, les doutes soi-disant soulevés sont inexistants"
— > Je ne vois pas en quoi cette métaphore devrait régler son compte au problème dont il s’agit. Inventer une expression ad hoc ne résout rien en ce genre de cas. C’est plutôt un cache misère.
3) "En outre, dans les faits, suivant les circonstances, le lieu, le moment, l’inspiration, les dispositions plus ou moins bonnes, le recul et/ou le jeu concerné, on ne tranche pas toujours la question"
— > C’est précisément ce qui suscite le doute dont il s’agit, mais qui, si je vous suis, n’a pas lieu d’être.
"Plus exactement, on croit toujours la trancher mais on peut parfois être pris au piège par un conditionnement inconscient ; on ne finit pas par dire à sa manière ce qu’il nous plait de dire lorsque l’on copie sans se poser la moindre question des préceptes d’écriture établis depuis des lustres, a fortiori si le mérite de ces règles implicites n’a eu de cesse de s’étioler au fil des années. Donc, face au anything goes, posons le anything else. Ainsi, le doute est dissipé, et la parole non seulement permise, mais aussi pleinement nécessaire"
— > il faudrait sur ce point aussi que vous vous expliquiez un peu mieux (plus de caractères) parce qu’en l’état, il n’y a aucun rapport entre ce qui précède et ce qui suit votre « donc » : vous vous contentez de conclure ce qui vous arrange.
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