02. Secret Special Pirate Kart Weekend

2012 IGF Pirate Kart

2012 IGF Pirate Kart : la pochette surprise du jeu indépendant

En mars 2012 se tiendra le 14e Independent Games Festival (IGF), le plus important événement de la scène "indé", qui a récompensé les années précédentes des jeux comme Minecraft, Amnesia : The Dark Descent, Machinarium, World of Goo... Les soumissions de jeux viennent de se terminer et exigeaient un droit d’entrée de 95$, une somme réellement dissuasive pour les game designers amateurs, dont certains ont bruyamment protesté. C’est alors que Mike Meyer, figure bien connue du milieu, a pris l’initiative de regrouper dans un pack tous les jeux qui lui seraient envoyés afin de les présenter en une soumission unique au festival. Le résultat : l’IGF 2012 Pirate Kart rassemble plus de 300 micro-jeux.

Entretien avec Mike Meyer

Merlanfrit : Cette compilation, le Pirate Kart, a été inspirée par les cartouches pirates 8-bit. Pouvez-vous expliquer à nos plus jeunes lecteurs de quoi il s’agit ? Ressentez-vous de la nostalgie pour cette époque, ou n’est-ce qu’un clin d’œil ?

Mike Meyer : À l’époque où les jeux étaient sur cartouches (cartridge, c’est la partie "cart" du titre), surtout sur NES, certaines personnes ont eu envie de court-circuiter la licence Nintendo - ou d’autres fabricants - et de vendre leurs propres cartouches. Encore plus limite, ils mettaient sur ces cartouches des versions pirates de jeux officiels et les vendaient avec des étiquettes du style « 99 jeux en un ! » (c’est la partie "pirate" du titre). Ils avaient tendance à mettre plusieurs versions vaguement différentes du même jeu, certaines ne fonctionnant pas, et même comme ça le nombre de jeux était souvent erroné. Je n’en ai jamais eu personnellement mais c’est évident que certains contributeurs de l’IGF Pirate Kart en sont nostalgiques !

Crime Zone

C’est GloriousTrainwrecks.com qui a commencé de façon assez délirante à faire ses propres cartouches pirates (avec un « k », juste comme ça) pour participer à la compétition de TIGSource’s « B-Game » en tant que communauté. 17 personnes ont fait plus de 100 jeux en quasiment 48 heures ! C’était incroyable ! Finalement, GloriousTrainwrecks.com a fait encore plus fort avec son propre événement, The 529 in 1 Klik and Play Pirate Kart Part II : Klik Harder, où une centaine de personnes ont fait plus de 500 jeux en 498 heures ! Et Jeremy Penner leur a fait un launcher épatant ! Il y a eu aussi le Vector 3D Jam Multi-Game Pirate Kart qui a sans doute moins fonctionné je pense à cause de sa restriction : Vector le Crocodile devait être dans tous les jeux. Je pense que ça fait donc de l’IGF Pirate Kart le quatrième épisode. Et son nom vient réellement davantage de ces compétitions que des cartouches pirates.

"Dès que j’ai le temps, mon objectif est de m’asseoir, d’utiliser le bouton « Random » et de me laisser surprendre."

Quel genre de jeu peut-on trouver dans le Pirate Kart ? Il y a énormément de jeux dans ce bundle, les joueurs peuvent s’y perdre… Quelques perles ?

Les jeux sont relativement petits, très personnels, sans doute très bizarres. Je dois avouer que je n’ai pas encore pu tous les voir en détail. Dès que j’en aurai le temps, mon objectif est de m’asseoir, d’utiliser le bouton « Random » et de me laisser surprendre.

Space Phallus

"Je suis halluciné par l’excitation et aussi par le plaisir des gens qui n’auraient jamais vu des choses aussi folles en temps normal !"

Le "Kart" a l’air d’avoir eu un immense succès et vous a coûté énormément d’argent en bande passante. Êtes-vous satisfait des réactions pour le moment ?

Ça m’a coûté énormément d’argent, 2764,12$ la dernière fois que j’ai regardé. Si j’avais eu plus de temps pour me préparer, j’aurais sans doute été capable de trouver une meilleure manière de l’héberger, mais j’ai préféré faire vite. Je ne suis pas embêté par tout ça en fait. Ça valait vraiment chaque centime dépensé. C’est un véritable succès ! Même si le Kart n’est pas sélectionné ou se fait disqualifier, c’est devenu quelque chose de plus important que l’IGF lui-même pour moi. Je suis halluciné par l’excitation et aussi par le plaisir des gens qui n’auraient jamais vu des choses aussi folles en temps normal ! Il y a quelques trolls bien évidemment, mais quasiment toutes les réactions que j’ai vues relèvent de la curiosité à l’idée de pouvoir mettre la main sur une tonne de jeux gratuits et totalement fous qui n’auraient jamais bénéficié de toute cette attention autrement. Je n’aurais jamais imaginé que les choses se passeraient aussi bien !

Le Pirate Kart est aussi une sorte de protestation contre les frais d’entrée demandés par l’IGF. Pensez-vous que le succès du marché des jeux indépendants soit une menace pour les « bedroom coders » ? Certains jeux indés ont des qualités de production très élevées, avec lesquelles les titres plus expérimentaux ont du mal à rivaliser... Vous ne pensez pas que la scène risque d’être accaparée par des stars comme Jonathan Blow (Braid) ou Notch (Minecraft) ?

Vous croyez ? Pourquoi PARTICIPER à une compétition en protestant ? C’est comme manifester contre la fourrure en tuant un animal et en enfilant sa peau. Je sais que certains contributeurs ont des comptes à régler sur ce sujet, mais je ne pense pas qu’ils parlent pour tous. Ni moi non plus d’ailleurs. De mon côté, j’ADORE cette idée d’une ouverture au plus grand nombre, mais je ne suis pas sûr que ce soit ce que l’IGF devrait faire. Le succès de certains ne diminue pas nos réussites à nous. On dit bien que « la marée montante soulève tous les bateaux ». Bien sûr, certaines personnes seront davantage vues ou entendues que les autres mais de nouveaux jeux ou de nouvelles célébrités indé débarquent tout le temps. Il est aussi important de noter que les gens qui travaillent sur ces jeux ne sont pas tous intéressés par l’attention, l’argent, la renommée ou l’idée de faire partie d’une scène. Nombreux sont ceux qui aiment faire des jeux juste comme un hobby, vous voyez ?

Where Am I ?

"Ils ne peuvent pas non plus prétendre que tout le monde est accepté alors qu’ils dressent ce genre de barrière, n’est-ce pas ?"

D’un autre côté, vous ne pensez pas que les frais de 95$ peuvent se justifier ? La compétition doit aussi se soumettre à des conditions, sous peine de noyer le jury sous une avalanche de jeux pas terminés ou sans intérêt ?

Totalement. L’IGF est une société privée et ils n’ont pas BESOIN de justifier quoi que ce soit. Le jury a déjà pas mal de pain sur la planche. J’ai entendu dire qu’il y avait plus de 600 jeux présentés cette année ! Et c’est en comptant le Pirate Kart comme un seul jeu… Ils ont une bonne raison d’avoir des règles. Mais ils ne peuvent pas non plus prétendre que tout le monde est accepté alors qu’ils dressent ce genre de barrière, n’est-ce pas ?

(propos recueillis par Martin Lefebvre, traduits par Anthony Jauneaud et Sachka Duval)

1958 BNL

Quelques jeux du 2012 IGF Pirate Kart

Évidemment, nous n’avons pas eu le temps de tester tous les jeux du bundle. Certains jeux, soyons honnêtes, ne méritent pas plus de deux secondes et demi d’attention, mais d’autres sont réellement de petites perles - cabossées certes - de gameplay ou de narration, qui méritent qu’on ne s’arrête pas aux graphismes qui font saigner les yeux. Cette liste sera complétée au fil de nos futures découvertes avec davantage de micro-critiques qui seront l’occasion d’un nouvel article. N’hésitez pas à mentionner les vôtres dans les commentaires !

Crime Zone (Stephen Murphy) : on incarne un inspecteur qui explore un réseau de rues sinistres, mais chaque déplacement nous projette dans la peau d’un autre personnage...

Where Am I ? (Ben Powell) : un jeu de labyrinthe dans le noir, les murs se révèlent brièvement quand on se cogne. Minimaliste et très agréable à jouer.

Space Phallus (Charlie Knight) : c’est la minute provoc adolescente : notre vaisseau est attaqué par des phallus volants qui tirent des giclées de sperme et des essaims de spermatozoïdes... Jouissif ?

1958 BNL (Mike Meyer) : un jeu de plateforme-puzzle où l’on guide un astronaute en apesanteur à travers un système de portails colorés. Un bon level design avec un set-up minimaliste.

Silent Skies (Michael Todd) : ambiance particulièrement planante grâce à la musique, aux couleurs pures, au décor à la limite de l’abstrait : on pilote un avion, et même s’il lâche des missiles de lumière sur des ennemis menaçants, tout semble étrangement serein.

Silent Skies
Il y a 3 Messages de forum pour "2012 IGF Pirate Kart : la pochette surprise du jeu indépendant"
  • bleubleu Le 21 octobre 2011 à 21:36

    J’ai juste commencé à l’éplucher. Les jeux de Terry Cavanagh sont bien sympa. Graveyard Graveyard Revolution est un DDR où l’on danse sur les tombes de The Graveyard. La crise cardiaque tient lieu de "Game Over" et nous fait perdre tous nos points. Hero’s Quest c’est l’incroyable aventure JRPG steez d’un petit garçon qui part jouer dans la forêt et revient quand c’est l’heure de manger. 
    Dinosaur liberation front est un jeu de plate formes 2D/ puzzle par lilserf. Il faut libérer de pauvres bébés dinosaures frais éclots des salles de test où ils servent de cobbayes. Ça se passe en deux temps, on attrape un dino, puis on le jette avec la souris vers les ouvertures dans le mur qui cerne l’écran, c’est plus ou moins durselon le tableau. Je crois que je suis bloqué au sixième tableau, je ne sais pas combien il y en a mais j’ai bien envie de continuer. 
    My first IGN interview est un simulateur textuel d’entretient d’embauche chez IGN à l’attention des femmes adultes par Noyb. 
    Murder dog4 par Stephen Murphy nous propose de suivre Murder Dog au tribunal international chargé de juger ses nombreux crimes, le tout nous est montré à l’aide de figurines en pâte à modeler et de décors en carton. On interagit avec une interface qui associe des verbes et des objets. J’ai essayé detruire>jurés. Ça s’est terminé en un massacre sanguinolent digne de cannibal holocaust. Je suis curieux de voir ce qu’il est possible de faire.

    BTW, très bonne initiative, le site comme l’interview, bravo !

  • Martin Le 21 octobre 2011 à 22:25

    Pour ma part, outre les jeux de Cavanagh et de Meyer, j’ai craqué sur la production de Bento Smile que je connaissais pas... Plus des expériences que des jeux, mais il a un humour très personnel, à la fois gore et subtil, j’adore.

    Mais je réserve cela pour le prochain article, on a un peu décidé de faire un week-end surprise Piratekart.

    /tease.

  • roger Le 17 janvier 2013 à 22:21

    Si le site ressort régulièrement alors que tu fais des recherches sur des fleurs c’est peut-être pas si bon signe que ça.

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