En novembre 98, Half-Life s’ouvrait sur une fameuse séquence de monorail durant laquelle le joueur découvrait en cinq minutes le complexe de recherche Black Mesa. Portal 2 constitue pour Valve un retour aux sources, étirant le tour de manège sur une dizaine d’heures. Dès l’ouverture, le joueur est projeté sur un tapis roulant narratif, qui ne le lâche pas un seul instant, qui le distrait par ses bouffonneries, et ne cesse de le stimuler par ses surprises. Des robots s’affairent autour du joueur, se crêpent le chignon et enfilent les vannes, les jouets sont périodiquement renouvelés, des torrents de gel multicolore sont déversés pour notre plus grand plaisir. La visite des tréfonds historiques d’Aperture Science est prétexte à une succession de situations cocasses, et le sujet de test applaudit le spectacle permanent de l’improbable et bouffonne science fair qui se joue pour son plus grand plaisir. Spectateur privilégié, ravi d’être admis dans la fabrique de ses rêves, le joueur est un peu comme le héros de Charlie et la chocolaterie, les yeux grand ouverts et les papilles vibrantes, mais voyageur passif plus qu’acteur à part entière. En ce sens, Portal 2 est l’exact antithèse de SpaceChem : pas question ici de créer sa propre voie, de monter sa chaîne d’assemblage. Malgré les propriétés éminemment émergeantes du portal-gun, les puzzles sont généralement conçus pour avoir une seule et unique solution.
On pourrait regretter la linéarité, si toutefois on en avait le temps. Mais le tapis roulant Portal 2 nous emmène à un rythme si échevelé, nous submerge d’une telle alacrité, que nous ne pouvons que célébrer ici le triomphe de la narration sur le gameplay.
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